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Press release: les diamants du LSPES

Communiqué de presse relatif à l’article :
Deformation of (Mg,Fe)SiO3 post-Perovskite and D’’ Anisotropy
par Sébastien Merkel*, Allen K. Mcnamara, Atsushi Kubo, Sergio Speziale, Lowell Miyagi, Yue Meng, Thomas S. Duffy, Hans-Rudolf Wenk
A paraître dans Science le 22 juin 2007

Informations complémentaires

La structure interne de la Terre

L’intérieur de la Terre nous est inaccessible directement (les forages les plus profonds ne sont que des égratignures). Notre connaissance de la Terre interne provient de l’étude des ondes sismiques qui se propagent dans la Terre à partir du foyer d’un tremblement de Terre. Nous savons aujourd’hui que la Terre est divisée en couches. La croûte sur laquelle nous vivons ne représente qu’une fine pellicule. L’enveloppe principale s’appelle le manteau. C’est une couche constituée de roches solides qui s'étend jusqu'à 2.900 km de profondeur. Vient ensuite le noyau, liquide dans sa partie périphérique qui contient une partie solide – la « graine » - de 1200 km de rayon. La frontière entre le manteau et le noyau intrigue les géophysiciens depuis longtemps. Les données sismiques issues de cette région (appelée couche D") révèlent une structure variée et complexe dont l’origine reste un des mystères de la Terre interne.

D’un point de vue minéralogique, le manteau terrestre est constitué à 80 % d'un silicate de structure cristalline perovskite. Ce minéral constitue la moitié de la masse de la Terre ! En 2004, plusieurs équipes, notamment japonaises, ont montré que la perovskite se déstabilise au voisinage de la frontière noyau-manteau. Il faut dire qu’à cette profondeur la température atteint plusieurs milliers de degrés Celsius et que la pression y est de plus d'un million de fois supérieure à la pression atmosphérique. La nouvelle phase formée (la post-perovskite) serait-elle la clé de la couche D" ?

Expérimentation aux conditions de la Terre profonde

Dans la Terre profonde, les minéraux sont soumis à des conditions extrêmes de pression et température, 135 GPa (1,35 millions d'atmosphères) et 3500 K à la frontière noyau-manteau (2900 km de profondeur), 365 GPa (3,6 millions d'atmosphères) et 6000 K au centre (6371 km de profondeur). Pour comprendre et modéliser le comportement des minéraux en profondeur, les scientifiques doivent reproduire ces conditions au laboratoire, ce qui n'est pas chose aisée! Pour ce faire, on utilise une cellule à enclume de diamant.

La cellule à enclumes de diamant est un instrument fondamental pour l'étude expérimentale des matériaux du manteau et du noyau terrestre. Le domaine de pression et température accessible par cette technique couvre pratiquement tout le domaine de pression et de températures que l'on rencontre à l'intérieur de la Terre et des planètes telluriques : pression jusqu'à 500 GPa (5 millions d'atmosphères) et température jusqu'à 5000 K.

La cellule à enclumes de diamant repose sur un principe physique simple : pour atteindre des pressions élevées il faut appliquer une force importante sur une surface la plus réduite possible. Le diamant présente des caractéristiques de résistance à la compression exceptionnelles. L'échantillon à étudier sous pression est placé dans un trou (de 50 à 300 mm de diamètre) percé dans une feuille d'acier (le joint) de quelques dixièmes de millimètres d'épaisseur que l'on serre entre deux diamants taillés et présentant une surface plane (la tablette) d'un diamètre variant de 10 à 700 μm.

L'échantillon est ensuite chauffé à l'aide de lasers infra-rouge puissants. Ils sont focalisés sur l'échantillon au travers du diamant et permettent de porter la température à plusieurs milliers de degréssans trop échauffer les diamants. La température est déduite de l'analyse de la lumière émise par l'échantillon chauffé. En effet, la couleur ou encore la distribution des intensités en fonction de la longueur d'onde de ce rayonnement dépend de la température à laquelle l'échantillon est porté.

Le synchrotron

Un synchrotron est un instrument puissant comparables à des «supermicroscopes», qui apporte des informations inestimables dans de très nombreux domaines de recherche. Une cinquantaine de synchrotrons dans le monde tentent de répondre aux besoins toujours croissants des scientifiques. Les trois plus grands et plus performants synchrotrons dans le monde sont l'ESRF à Grenoble, l'APS, près de Chicago aux États-Unis, et Spring8 au Japon.

Dans ces expériences, on utilise le synchrotron comme une source de rayons X puissants et très focalisés qui permet d'étudier les détails de la structure des minéraux confinés dans les cellules diamants.

Une collaboration internationale

Les résultats présentés dans cet article résultent d'expériences réalisés sur la ligne HPCAT du synchrotron APS, près de Chicago aux États-Unis. Ils sont le fruit d'un collaboration internationale menée par Sébastien Merkel à l'Université de Lille et impliquant des chercheurs de l'Université de Berkeley en Californie, de l'Université d'Arizona, de l'Université de Princeton, et du synchrotron APS.

Liens

Le manteau et noyau terrestres. Le matériau associé aux zones de subduction descend dans le manteau. Le matériau de la frontière noyau-manteau remonte dans des panaches et peut émerger en surface, à Hawaï ou la Réunion, par exemple. La frontière noyau-manteau est caractérisée par de fortes hétérogénéités et de l'anisotropie sismique.
Image adaptée d'un original d'Ed Garnero.
La structure de la phase post-perovskite, MgSiO3, un minéral important à la frontière noyau-manteau.
Image Patrick Cordier.
Vue de l'intérieur d'une cellule diamant. On observe les deux diamants taillés en pointe comprimant le joint, au centre duquel se trouve l'échantillon.
Image S. Merkel.
Une cellule diamant. On observe les deux diamants taillés en pointe comprimant le joint, au centre duquel se trouve l'échantillon. La couleur bleutée des diamants est due au laser bleu focalisé sur l'échantillon.
Image S. Merkel.
Vue aérienne du synchrotron APS, près de Chicago aux Etats-Unis.
Image APS.
 

© Sébastien Merkel, Université de Lille, France

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